mardi 5 juin 2012

Brésil: Les producteurs de soja s'opposent à Monsanto ‎

CAMPO NOVO DO PARECIS — Entré en contrebande au Brésil il y a quinze ans, le soja transgénique est devenu la planche de salut des agriculteurs brésiliens, mais aujourd'hui cinq millions d'entre eux refusent de payer des redevances sur ces semences au groupe américain Monsanto.

Le soja a été génétiquement modifié dans les années 1990 aux Etats-Unis pour contrecarrer les effets des désherbants. En 1998, les premières semences OGM sont entrées en contrebande au Brésil, via l'Argentine et leur utilisation a été interdite jusqu'à la dernière décennie.

Moins de quinze ans plus tard, la commercialisation de ce soja modifié est non seulement autorisée mais sa culture n'a cessé de gagner du terrain. Il représente 85% des 25 millions d'hectares de soja plantés dans tout le Brésil, soit 7% du territoire, explique à l'AFP Alexandre Cattelan, chercheur à l'Institut public de recherches en agriculture (Embrapa).

En 2011, le Brésil était le deuxième producteur et exportateur mondial - derrière les Etats-Unis - de cet oléagineux utilisé pour alimenter le bétail, la fabrication d'huile et de biocarburant. La Chine est le principal acheteur du soja brésilien.

Monsanto, le géant américain de l'agrochimie, perçoit des millions de dollars par an pour sa semence certifiée de soja Roundup Ready (RR), résistante à l'herbicide glysophate.

Tout allait bien pour cette culture transgénique controversée la plus rentable du Brésil, dont le chiffre d'affaires a atteint l'an dernier 24,1 milliards de dollars et a représenté 26% des exportations agricoles. Mais il y a quatre ans, cinq millions de grands et petits producteurs brésiliens ont intenté un procès à Monsanto qu'ils accusent de "s'approprier de façon indue" 2% du montant de la vente de leur récolte annuelle.

Depuis la récolte de 2003/04, Monsanto a exigé que les producteurs lui versent 2% de la vente de leur soja certifié au titre de la propriété intellectuelle sur les semences, rappelle à l'AFP Neri Perin, représentant des grands agriculteurs.

"Les agriculteurs payent un impôt privé sur la production", confirme l'avocate Jane Berwanger, qui représente les producteurs.

En avril, un juge régional de l'Etat du Rio Grande do sul (extrême sud du Brésil), Giovanni Conti, a tranché en faveur des producteurs et a ordonné à Monsanto de rendre les royalties perçues depuis 2004, soit au minimum deux milliards de dollars.

Le groupe américain a fait appel. Quelle qu'en soit l'issue, l'affaire devrait être portée devant la justice fédérale en troisième et dernière instance.

Interrogée par l'AFP, la société Monsanto s'est limitée à dire qu'elle continuait à percevoir les redevances en compensation pour sa technologie jusqu'au jugement définitif.

Malgré la dispute judiciaire avec Monsanto, le soja transgénique a gagné de l'espace au Brésil en dépit des protestations des écologistes qui dénoncent la destruction d'écosystèmes fragiles et rejettent l'expansion spectaculaire de cette monoculture hautement mécanisée, souvent aux dépens de la forêt amazonienne

La progression de cette culture menace aussi le "cerrado" brésilien, une région de savane de deux millions de km2 qui abrite 5% de la biodiversité mondiale, a prévenu l'ONG environnementale WWF.

"Le soja transgénique occupe 44% de la surface cultivée de céréales et d'oléagineux mais ne représente que 5,5% des emplois du secteur agricole", a déploré à l'AFP Sergio Schlesinger, chercheur et auteur du livre "Le grain qui a trop poussé".

La hausse de la consommation de viande dans les pays émergents a contribué au succès du soja modifié génétiquement. La demande mondiale de cet oléagineux est forte, les stocks sont faibles, et son cours est en hausse.

Ce soja est cultivé dans 17 des 27 Etats du pays et c'est dans le Mato Grosso (centre-ouest) qu'il est le plus présent.

Source: AFP

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