mardi 16 février 2010

Climategate: la principale victime reprend la parole

Photo : ce qu'il reste du lac Huangyangchuan, en Chine, en juillet 2009 (China Daily)


C'est l'homme dont les médias attendaient un signe de vie depuis des mois. Phil Jones, le plus éminent des climatologues, en retrait depuis sa mise en cause dans le « Climategate », répond à la BBC sur les incertitudes des scientifiques quant au réchauffement climatique.

Phil Jones, directeur du Climate research unit de l'université de West Anglia, le centre de recherche britannique victime du piratage d'e-mails juste avant le sommet de Copenhague, reconnaît que le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (Giec), dont il est l'un des plus importants contributeurs, « a besoin de rassurer le public quant à la qualité de ses affirmations ».

C'est ce à quoi il s'emploie dans la longue interview publiée samedi 13 février par la BBC. Morceaux choisis et commentaires.




Y a-t-il réchauffement depuis 1995 ?

La température moyenne du globe inclut des relevés terrestres et maritimes, et selon la période sur laquelle on évalue la température moyenne, les résultats donnent lieu à différentes interprétations.

Ainsi, le réchauffement observé (+0,12°C par décennie) est le même sur trois périodes (1860-1880, 1910-1940 et 1975-1998), mais on note sur la période 2002-2009 un refroidissement de 0,12°C par décennie. Une « tendance qui n'est pas significative », relève toutefois Phil Jones, la période étant trop courte.

Valérie Masson-Delmotte, chercheuse au laboratoire des sciences du climat du CEA, se réjouit de cette « transparence sur les certitudes et les incertitudes » de la climatologie, au milieu de ce « déluge d'articles dans la presse anglo-saxonne, notamment dans les titres du groupe News Corp de Rupert Murdoch, visant à discréditer le Giec. »

Pas étonnée de lire les propos de son collègue, elle remarque :

« Le rythme du réchauffement s'est bien ralenti depuis la fin des années 90, c'est ce que les climatologues avaient anticipé, on appelle cela le plateau. »

L'homme est-il responsable du changement climatique ?

Quatre facteurs peuvent influer sur la température globale de la terre, rappelle la chercheuse française :

* la variabilité interne au climat (avec des phénomènes comme les courants El niño)

* les éruptions volcaniques

* l'activité du soleil

* et le surplus de CO2 lié aux activités humaines.

Justement, c'est parce que, sur la période 1975-1998, « en combinant l'influence solaire neutre et l'influence volcanique négative, on aurait du avoir un refroidissement » qui ne s'est pas produit, que les chercheurs concluent à la responsabilité de l'homme.

Cette simple déduction n'empêche pas Phil Jones de réaffirmer sa confiance « à 100% » dans le fait que le climat s'est réchauffé depuis les années 50, et dans la responsabilité humaine de ce phénomène.

Vit-on la période la plus chaude de l'Histoire ?

Le climatologue précise « qu'il y a encore débat sur le fait que l'optimum climatique médiéval ait été ou non global », car on manque de données pour l'hémisphère Sud. En fonction de ces données manquantes, on peut trouver que le réchauffement de l'an 1000 est supérieur à l'actuel ou l'inverse.

Les incertitudes de la climatologie tiennent au fait que « les données issues de la paléoclimatologie [notamment avec l'étude sur les cernes des arbres, ndlr] sont considérablement moins fiables que les mesures directes, mais nous devons utiliser les données disponibles pour étudier le climat sur mille ans ».

Interrogé sur le fait de savoir si le débat est clos entre scientifiques, il dit que « non », ajoutant :

« Il y a encore beaucoup de points qui ont besoin d'être étudiés pour réduire les incertitudes. »

Les scientifiques cachent-ils des données ?

Accusé, par la divulgation d'e-mails piratés, de vouloir forcer la démonstration d'un réchauffement climatique pour lequel il manquerait de données scientifiques, Phil Jones s'est aussi vu reprocher de ne pas donner accès à toutes les données brutes utilisées dans ses études.

Dans un article de la BBC qui accompagne l'interview, il confesse un certain manque d'organisation :

« L'ensemble des données sont continuellement mises à jour. Il est difficile de garder trace de tout. Certains pays font de nombreuses vérifications de leurs données et ensuite publient des actualisations, donc cela est très compliqué. Nous avons fait des progrès mais nous devons encore en faire. »

► Mis à jour le 16/02 à 10h23 : la période de refroidissement n'est pas 1995-2009 mais 2002-2009. L'erreur est due au fait que Phil Jones parle de « décennie » pour une période de 8 ans.

Titre reformulé pour éviter la confusion. Phil Jones n'est pas auteur mais victime du Climategate

Source: www.rue89.com

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